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Terribles Adlets

Photo du rédacteur: Marcelin BerthelotMarcelin Berthelot

I- Les origines



Il y a longtemps, dit-on, au nord du Canada, une femme inuite s'éprit d'un immense chien aux pouvoirs surnaturels, Ijirqang , alors qu'elle s'était jurée de ne jamais se marier.

Son nom était Niviarsiang et son surnom Uinigumissuitung , "celle qui ne prendrait pas de mari".


Ce mariage ne rassura pas spécialement le père de la jeune femme, Savirqong , qui les incite à aller vivre un peu plus loin du village (par mesure de sécurité), sur une île au-dessus d'une gigantesque baie, qu'on appellera plus tard la baie d'Hudson .

On peut dire que l'avenir lui donnera raison.




Après quelques mois de vie solitaire et joyeuse au bord de l'eau (même si la température n'était pas idéale pour se baigner) Niviarsiang tomba enceinte de son mari Ijirqang . Son ventre grossit, grossit à n'en plus finir, et engendrait des douleurs affreuses à la pauvre mère. Quelques temps plus tard, alors qu'Ijirqang était parti chasser, elle accoucha enfin. De dix enfants.


La portée se constituait d'horribles hybrides mi-hommes mi-loups. Les créatures surnaturelles ainsi créées - nommées adlets ou Erqigdlit - grandirent en seulement quelques heures, et devinrent de terribles bêtes, aux yeux de braises où rougeoyaient la haine et la colère, des loups qui se tenaient sur leurs pattes arrières munies de griffes pointues et effilées . Dans leurs gueules luisaient de terribles crocs coupants comme des rasoirs, et d'une blancheur éclatante.



II-Abandon


Ils firent si peur à la mère qu'elle décida de les abandonner sur les flots de la baie toute proche.


Elle fit aller et retours, emportant avec elle une créature à la fois, à cause de leur taille et de leur poids croissant. Elle a réussi à en abandonner cinq ainsi, sur une branche ballotée par les flots.

Mais au bout du cinquième retour, les adlets étaient devenus si grands qu'il était impossible à la mère de les porter. Et leur méchanceté ayant grandi en même temps que leur corps, la première a choisi que firent ces monstruosités fut d'attaquer leur mère.

Ils étaient sur le point de lui porter un coup mortel et plutôt douloureux quand leur père rentra dans la tanière, ravi de pouvoir enfin revoir sa femme et ses enfants - qu'il n'avait vu que tout bébés, et adorable, et surtout pas bipèdes ni monstrueux - après une longue chasse.


Il se rendit compte de la situation en un éclair et se jeta entre les adlets et la mère. Le coup fut intercepté.


Les créatures fuirent devant le terrible chien, et s'enfoncèrent dans les profondes forêts du Québec et du Labrador.


On dit que ceux qui furent abandonnés arrivèrent sur l'Autre Continent, situé derrière la Grande Eau, peuplèrent ces terres lointaines de monstrueuses créatures humanoïdes, se transformant durant la nuit en terribles loups, et transmettant leur monstrueuse maladie à chaque personne mordue, et que certains, mus par leur désir de vengeance, revinrent tuer les représentants de l'espèce de leur mère, elle qui les avait abandonnés sur de terribles flots alors qu'ils n'étaient que des chiots.


La mère quant à elle s'enfuit, folle de chagrin et de remords et erra en deuil sur les rives de la baie d'Hudson jusqu'à sa mort. On n'entendit plus jamais parler d'elle.

Cependant, sa diabolique engeance restée au Canada n'allait pas rester dans l'ombre de ses grands bois.



III- Crimes


Les adlets se multiplièrent, devinrent de plus en plus nombreux, et peuplèrent toutes les forêts de Terre-Neuve, du Labrador et du Québec, et peu après le Groenland et l'île de Baffin tombèrent eux aussi entre les griffes des terribles êtres humanoïdes.

Ils commencèrent alors leur longue série de crimes. Ils tuèrent de nombreux esquimaux de la région, les dévorèrent et allèrent jusqu'à sucer la moelle épinière des victimes, et firent régner le sang et la peur dans les pauvres régions qui étaient touchées.

Chaque cadavre étendu sur le sol attirait comme des mouches des meutes entières d'adlets.

Toutes les bêtes, à un kilomètre entier à la ronde, arrivaient les unes après les autres afin de se joindre au banquet bestial.



Les crimes étaient tous plus terrifiants et sanglants que les autres, et les victimes mourraient avec une lenteur effroyable. Les humains choisis pour passer sur la table n'avaient aucune chance. Ils étaient traqués dans le noir par des bêtes aux sens surnaturellement aiguisés, à l'agilité effrayante, à la vision nocturne hors norme...

Les victimes criaient de terreur dans le noir, entourés d'adlets, les seules lumières qu'elles voyaient étaient les lueurs tremblotantes de leurs yeux.

On dit que certaines, à force d'user de leur voix par terreur des monstrueux hybrides, la brisèrent.


Comme dit Racine dans Les Plaideurs : "Avec les loups on apprend à hurler"...


Même si là, la citation prend un tour légèrement morbide.

Et même quand les humains se cachaient, et que les animaux fuiaient, que l'hiver se faisait sentir durement, que la nourriture manquait dans les bois, les adlets vivaient, et se nourrissaient de racines et de champignons, et jamais leur soif de sang ne semblait apaisée...

Les pauvres humains des environs firent alors des expériences (ils y furent obligés) : il fallait à tout prix tuer ces sales bêtes, et trouver un moyen de les faire fuir.


IV- Les tuer


La meilleure solution trouvée fut le feu - même si la décapitation marche aussi, à condition de s'approcher de la bête, et surtout à condition de survivre à ses crocs acérés et sanglants et à ses griffes effilées.


La meute d'adlets avait horriblement peur du feu. Des attaques sur des humains armés de torches étaient quasiment inexistantes, et ce fut la solution la plus utilisée par les inuits.




Il semblait également que des entailles faîtes avec de l'argent semblaient les abîmer beaucoup plus que celles faîtes par l'acier, qui ne leur faisaient rien ; et les inuits remarquèrent bientôt que si le chef de meute mourait, ses adlets inféodés fuyaient - le plus souvent. Le chef était facilement reconnaissable : le plus grand et le plus fort (et celui qui te massacrait en premier).

Les inuits eurent tôt fait de s'armer tous de couteaux en argent et de torches, et des chasseurs d'adlets furent dépéchés à travers le pays. Les premiers hybrides furent alors tués. Mais ils étaient des milliers.


Et même aujourd'hui, si par hasard vous vous aventurez dans les noirs bois du Quebec au milieu de la nuit, vous pouvez encore voir les lueurs haineuses des yeux jaunes des adlets qui attendent patiemment l'heure de leur vengeance contre ces humains qui les avaient décimés.


FENRIR the GRAY



V- Sources


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