Révolte en Iran : les conséquences de la mort de Mahsa Amini

Marcelin Berthelot

16 déc. 20224 min de lecture

Le contexte

Depuis sa naissance en 1979 suite à une révolution, la République islamique d'Iran est une théocratie ( régime politique dont les dirigeants sont des leaders religieux ). Elle a imposé le port du voile aux femmes, élément central de son autorité et un moyen de contrôle social. Les slogans du régime comparent les femmes dévoilées à d'appétissantes pâtisseries qui pourraient tenter les hommes ou insistent sur la nécessaire modestie féminine, avec des images comme « une femme bien voilée est comme une perle dans son coquillage »! Ces arguments ont été au cœur de la propagande officielle d'un régime qui n'hésite pas à empêcher les femmes de se baigner en maillot de bain dans la mer Caspienne ou dans le golfe Persique, alors que les hommes peuvent se baigner torse nu.

La mort de Masha Amini comme détonateur de la révolte

Depuis le 16 septembre denier, les femmes iraniennes manifestent en Iran pour dénoncer la mort de Mahsa Amini, arrêtée par la brigade des mœurs pour mauvais port du voile. Elle est morte après être tombée dans le coma après avoir été arrêtée trois jours plus tôt et détenue par la police des mœurs. A Saqqez, la ville natale de la jeune femme femme kurde, environ 500 personnes se sont rassemblées pour protester dès l'annonce de sa mort. es militants ainsi que sa famille ont jugé sa mort « suspecte » , mais la police de Téhéran a affirmé qu'il n'y avait « pas eu de contact physique » entre les policiers et la victime. Trois personnes ont été tuées au cours des premières manifestations dans le Kurdistan iranien.

Une vidéo, partagée sur les réseaux sociaux, montre plusieurs femmes, au milieu d'une foule, danser et brûler leurs foulards. D'après l'auteure de la vidéo, les faits se déroulent dans sa ville natale, dans la région de Mazandaran, au nord de l'Iran. "Les gens de Mazadran, ma ville natale, dansent pour la liberté qu'ils sont purifiés. Je pleure en regardant des femmes brûler leurs foulards. Mahsha Amini a été tuée à cause de ce foulard, mais elle est devenue un tournant pour les Iraniennes et un tournant pour le régime" écrit-elle dans un texte qui accompagne les images.

La révolte du peuple iranien

En Iran, des femmes mourraient déjà par la faute de la police des mœurs, mais la médiatisation de l'affaire de Mahsa Amini a permis à de nombreux Iraniens de se faire entendre sur leur situation dans le pays. Les femmes iraniennes manifestent avec les hommes iraniens pour leur liberté. Les Iraniennes sont pleines d'espoir et veulent que le monde entier en parle.

Malgré cela, la répression est forte et violente. Par exemple, le chanteur iranien Shervin Hajipour qui a publié une chanson sur Instagram qui est basée sur la colère du public après la mort de Mahsa Amini a été arrêté par des policiers de Téhéran. Une autre femme, Nika Shakarami, a disparu pendant les manifestations. Elle a appelé un ami, lui disant qu'elle se faisait poursuivre par un policier et qu'elle était en danger. La police a rendu son cadavre battu et recousu de sa poitrine à son ventre à sa famille. Sa famille et ses proches disent qu'elle s'est faite tabasser, battre, torturer, violer par plusieurs policiers; on suspecte même que ses organes ont été pris, ce qui expliquerait les cicatrices. Son cadavre a été enterré trés loin de là où sa famille habite pour que sa sépulture ne devienne pas un lieu de manifestations. C'était une artiste, et une vidéo d'elle en train de chanter et rire est devenue virale.

Informer, une arme fondamentale

D'autres célébrités en dehors de l'Iran protestent contre les meurtres, en se coupant une mèche de cheveux (comme Anne Hidalgo par exemple). Avant les célébrités, plusieurs personnes en dehors d'Iran se coupaient les cheveux, affichant la phrase "say her name" pour inciter à continuer à parler de Mahsa Amini. Parmi elles, certaines incitent à demander à ce que la chanson "Baraye" de Shervin Hajipour soit nominée aux Music Awards, pour donner une visibilité supplémentaire à la situation de l'Iran.

Les Iraniennes demandent qu'on les aide à informer le monde entier puisqu'elles ont du mal à le faire à cause de leur connexion à Internet censurée par le gouvernement d'Iran. Elles se coupent les cheveux et brûlent leur voile, nous encourageant à faire de même sur Internet, à utiliser les hashtags corrects pour inciter les algorithmes à mettre le sujet en tendance (les hashtags sont : #mahsaamini et #FreeIran). Elles manifestent dans les rues et crient des slogans de protestation comme "mort au dictateur", ou bien "women, life, freedom" au péril de leur vie.

De nombreuses Iraniennes pensent que maintenant que le monde est au courant, la police des moeurs tuera un peu moins. Elles se disent qu'il est crucial que le monde entier voit et condamne ces meurtres pour changer les choses. Le régime Iranien a peur maintenant que l'affaire est connue, il coupe l'accès à internet en Iran et interdit les hashtags parlant de Mahsa Amini dans le pays. D'après l'ONG "Iran Human Rights", les responsables des répressions contre les manifestations ont fait plus d'une centaine de morts, dont des étudiants et lycéennes qui participaient aux manifestations. Il est rare qu'une personne iranien ne connaisse personne d'arrêter ou d'assassiner.

Pour conclure

Entre les partis politiques dans les pays occidentaux qui veulent interdire le voile et certains Etats musulmans qui veulent l'obliger, il est temps d'arrêter de contrôler les femmes. Ce qu'il se passe n'affecte pas seulement l'Iran, cela concerne plus généralement la question des droits des femmes, à une époque où l'on revient en arrière sur les droits des femmes et des droits humains. Par exemple aux Etats-unis ou bien en Europe occidentale où l'extrême-droite misogyne gagne en puissance. Il est temps de considérer que des droits de la femme et des droits de l'Homme basiques ne sont pas un privilège, mais un minimum.

Parlez en autour de vous et signez cette pétition : https://www.amnesty.fr/petitions/iran-manifestez-vous-pour-la-jeunesse-iranienne-reprimee .

Prunelle P. et R. B.